Les élections approchent. Certains sont tentés de me dire «ça n’a rien à voir avec la culture». Le problème étant que les gouvernements se succèdent et ont chaque fois un impact directement néfaste sur celle-ci. Les élections la concernent donc. On ne sait de quoi sera fait le futur du pays de «l’exception culturelle» mais l’on sait sans aucun doute que le dernier président en fonctions a été le plus exceptionnellement sévère avec elle.
Et la France et l’Europe et le monde entier de refuser d’entrer enfin dans le XXIème siècle… Le XIXème siècle est né en 1815 et le XXème est incontestablement né avec la Première Guerre mondiale. Faut-il systématiquement des guerres pour changer d’ère ? Faut-il systématiquement se battre pour changer d’air ?
Le XXIème siècle fait peur parce que jusqu’à présent, chaque nouveau siècle a apporté son lot de pire. Le futur fait peur, et le passé, qui a pourtant été terrible, se fait le grand consolateur du monde. C’est la valeur sûre. A tel point qu’on se demande si les collégiens ne vont pas finir par manifester pour qu’on leur rende leurs cours d’histoire. Après tout, la politique vue de loin, c’est beaucoup plus simple que la politique présente et à venir : quelle sera-t-elle ?
Alors on ressasse, et on ressasse. Même les groupes londoniens se mettent étrangement à ressembler à leurs grands frères les Beatles. On pense entendre un vieux tube des 60’s avant de s’apercevoir que c’est un titre tout fraîchement pondu par des jeunes qui n’ont que 22 ans.
Et les gourous de prévoir la fin du monde pour le 12/12/12. Le must du moment ? Revoir couler un paquebot titanesque, en 3D s’il-vous-plaît, histoire de s’offrir un des plus horribles drames comme si on y était. Comme s’il n’y en avait pas assez en vrai, des drames. On s’offre le luxe de ressortir un film déjà vu, parlant d’une histoire bien passée, mais toujours mystérieuse, et si confortablement loin de nous à présent. Un siècle plus tard. L’avoir vu sans la 3D, c’était pas pareil. Aujourd’hui, on se sent mieux angoissé/en larmes/anéanti devant une tragédie centenaire que plongé/coulé/sombrant dans un quotidien dont on n’arrive pas à sortir comme d’une salle de cinéma, avec juste les larmes aux yeux, vite épongées au kleenex.
Bref, pleurer un drame d’hier, c’est bien plus facile que d’affronter le calvaire d’aujourd’hui, celui d’avancer à reculons, d’être soi-même un kleenex qu’on jette sitôt la tâche qui nous était confiée accomplie.
Il y a bien quelque chose qui s’annonce en 2012. Mais il n’appartient qu’à nous de le construire, et de le provoquer. Si ce n’est pas la fin du monde, ce sera en tout cas la fin d’un monde, la fin d’un siècle.
Et si on ne fait rien pour provoquer ce changement les 22 avril et 6 mai 2012, nos arrière-petits enfants materont dans un siècle le naufrage de leurs anciens sur des écrans géants. Puis ils sècheront leurs larmes en retournant à leur oubli du passé.
Au sommaire du magazine :
Erwan Larher, Nathalie Kuperman, Steve Tesich, Gaëlle Josse, Virginia Woolf, Olivier Steiner, World of Nolife, Patrick Devresse, Caravan Palace, Rover…
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Bonne lecture !