Héros malgré lui ?
Quelques mois après les événements de Captain America Civil War, la vie reprend son cours pour Peter Parker entre les études et sa tante May. Pourtant il aspire à être bien plus qu’un héros de quartier comme le préconise Tony Stark. Lorsqu’il commence à enquêter sur un trafic d’armes ultra sophistiquées, il va se heurter non seulement à des ennemis mortels mais aussi à ses proches qui doutent de lui…
Après Tobey Maguire et Andrew Garfield, c’est au tour de Tom Holland d’incarner Peter Parker et son alter ego. Quant à Jon Watts, il succède derrière la caméra à Sam Raimi et à Mark Webb pour transposer à l’écran les aventures de l’homme-araignée. Ces dernières années l’adaptation de la franchise a connu deux revers cinglants, facilités par la lutte intestine entre Disney et Sony pour une affaire de droits (la même qui oppose Disney à la Fox pour Fantastic Four). Au final, Disney parvint à faire plier le géant japonais et fit revenir dans son giron le fils prodigue, un plus pour sa juteuse licence Avengers. Bien évidemment dans ce jeu de dupes, le fan et le spectateur de la première heure peut légitimement être dérouté par la tournure des événements et regretter le temps béni où Sam Raimi et Tobey Maguire transfigurait le héros créé par Stan Lee. Le doute était bien évidemment de mise vis-à-vis du projet de Jon Watts, surtout que les dernières productions du genre de la maison aux grandes oreilles ne firent point l’unanimité.
Pourtant dès les premières minutes, le cinéaste fait taire les critiques et les sceptiques non pas en accouchant d’un produit bien balisé mais bel et bien en s’opposant au fan service de rigueur. Partant d’une exposition du mal fort bien menée (malgré le énième sermon du gouvernement est à l’origine de tous les maux), Watts rappelle ici les premières heures de Brian Synger sur X-men et son ouverture où le jeune Magnéto se confrontait à l’horreur des camps de la mort, toute proportion gardée. Watts redonne ainsi une véritable origine au mal ce qu’il ne fait pas en revanche pour son héros. Refusant le reboot impossible, le réalisateur met à mal le principe des origines pour mieux faire renaître ses protagonistes. L’accident n’est évoqué que succinctement et le drame familial bien connu des fans abordé que par ellipse. D’ailleurs, il s’agit bien des aventures d’un adolescent plutôt qu’un jeune adulte dont on suit les aventures accentuant ainsi le récit initiatique mais pour une fois d’une autre nature. Car Watts préfère parler de régression pour parvenir à maturité plutôt qu’une ascension vertigineuse point d’orgue des autres récits du genre. Il dissémine les références au comic book d’origine avec parcimonie et parvient à plusieurs reprises à surprendre les plus fins connaisseurs de l’histoire. En outre, le film puise sa force dans le refus d’exploits spectaculaires ; quand ils existent ce n’est que pour mieux les formater. Non le cinéaste adopte lui la mise en place de l’échec pour faire revivre le phénix, et contredit les gracieux ballets aériens de ces prédécesseurs par des déplacements patauds et maladroits. L’apprentissage d’homme ne se fait plus seulement dans les choix moraux mais aussi dans la découverte de son corps…et de ses possibilités. Tous ces bons points nous feraient presque oublier la grande et seule faiblesse du film. A force de trop vouloir bien faire et de vouloir parfois trop en faire, Jon Watts oublie de faire interagir notre héros avec son environnement social, ce qui faisait la force des films de Sam Raimi.
Cependant, il serait dommage de bouder ce Spiderman : Homecoming. Pas une vraie réussite mais véritable bouffée d’air frais, le film se veut et devient plus qu’un simple produit malgré ses défauts et revient finalement aux bases du mythe…celui de l’homme derrière le masque.
Film américain de Jon Watts avec Tom Holland, Michael Keaton, Robert Downey Jr. Durée 2h14. Sortie le 12 juillet 2017