Y a-t-il encore un dieu pour sauver Asgard
Confronté à la redoutable Héla, la déesse de la mort, Thor va devoir trouver de nouveaux alliés afin d’empêcher la fin de tout, le Ragnarok.
Le temps passe, et on continue à tort ou à raison de reprocher aux majors d’accoucher de films de super-héros depuis maintenant près de vingt ans. Pourtant les critiques vives vis-à-vis du genre sont en partie injustifiées quant à la personnalité même du media. Si certains voient toujours et encore la même substance, force est de constater que les différentes firmes hollywoodiennes abordent le sujet avec un style maison qui leur est propre à défaut d’une qualité finale toujours présente. Si Warner/Dc adopte un style baroque et gothique, et la Fox une forme plus acide, Disney présente un véritable côté fan service amplifié de plus en plus par un humour plus ou moins bienvenu, encore plus depuis le succès des Gardiens de la Galaxie.
Cette formule, la saga Thor l’a appliquée deux fois mais avec parcimonie. En revanche, nul ne peut nier le résultat plus que mitigé, qui a dit en deçà, des deux premiers volets. Entre une mauvaise tragédie de peplum pour le premier et un mauvais hommage envers Walter Simonson pour le second, il ne fait aucun doute que la qualité autour de la franchise laissait fortement à désirer. Sa conclusion en forme d’apocalypse ne suscitait ni attentes et encore moins craintes tant personne n’en espérait plus rien. Du coup, Disney plaça ses derniers espoirs en Taika Waititi, connu principalement pour sa comédie légère et décalée, Vampires en toute intimité.
Reprenant les éléments graphiques de Jack Kirby et ajoutant la saveur très en vogue des sixties, Waititi oriente donc ce dernier chapitre de la saga vers un contraste saisissant et surprenant. En outre, il y mélange allègement les sagas Planète Hulk et l’arc Ragnarok qui puise lu même ses sources dans les légendes nordiques, propres aux aventures du dieu sus nommé. De toute façon, la fin du monde arrive, alors célébrons là dignement et surtout avec le sourire. Usant des artifices et subterfuges de James Gunn sur le premier Gardiens de la Galaxie, le cinéaste n’hésite jamais à mélanger l’épopée et les bons mots, le comique de situation ce jusqu’à l’excès. L’excès c’est le maître mot de ce Thor : Ragnarok. L’humour, le fan service, l’action baroque tous les éléments du grand spectacle contemporain sont présents. Jusqu’à l’overdose ? Pas tout à fait…
Si le spectre du produit inoffensif qui frappe les productions Marvel Studios depuis désormais deux ans point très souvent à l’horizon, il est en revanche balayé par les velléités certes toutes relatives d’introspection pour son protagoniste principal. En dépouillant progressivement son héros de ses attributs virils, Waititi rappelle par moments la démarche de Chang Cheh par le passé avec La rage du tigre. Afin d’atteindre son but, le « manchot » se doit de retrouver son amour propre et oublier ses démons. En cela et toute proportion gardée, Thor Ragnarok propose un second degré de lecture assez intéressant derrière le produit rutilant affiché en vitrine.
Jamais condescendant avec son sujet en dépit des limites vite atteintes, Waititi n’essaie en aucun cas de se voir trop beau même si on aurait très souvent préféré qu’il lorgne un peu plus vers le chemin de croix du dieu du tonnerre. Réjouissant et spectaculaire à défaut d’être innovant, à la fois dans la lignée de ses prédécesseurs mais les surpassant tous, Thor : Ragnarok a le mérite d’exister pour ce qu’il est : un bol d’air ni pompeux ni parfait.
Film américain de Taika Waititi avec Chris Hemsworth, Tom Hiddleston, Cate Blanchett. Durée 2h10. Sortie le 25 octobre 2017.