Y a t-il encore un héros pour sauver le super ?
Afin de contrer une menace millénaire, Batman va assembler une équipe de héros aux pouvoirs hors du commun capable de sauver l’humanité.
L’adage d’aujourd’hui veut que le genre super héroïque n’accouche uniquement des mêmes films, sans saveur, sans originalité ni personnalité. Pourtant, les différentes majors productrices de ce type de long-métrage insufflent un réel caractère malgré les protocoles formels d’usage. Il ne faut pas oublier que par le passé, les deux maisons mères des comics book, Dc Comics et Marvel Comics affichaient déjà une véritable singularité quand Stan Lee décida de mettre en avant le côté humain de ses surhommes, le confrontant aussi bien à des menaces extraordinaires qu’aux tracas du quotidien. Les adaptations cinématographiques n’ont pas dérogé à cette recherche de spécificité ces dernières années, Dc et Warner ayant opté pour une approche mature et surtout très sombre de leur univers. La raison en incombe aux Batman de Christopher Nolan, dont l’approche graphique et psychologique très adulte était censée orienter le reste des productions à venir Cependant, malgré tout la bonne volonté du monde du cinéaste, Suicide Squad, Green Lantern et Zack Snyder sont depuis passés par là…
Ce dernier se retrouve d’ailleurs aux commandes de ce Justice League après un Man of Steel calamiteux et un Batman vs Superman cloué au pilori. On retrouve d’ailleurs au casting les mêmes protagonistes ainsi que des nouveaux venus de Jason Momoa à Ezra Miller. But du réalisateur : trouver la même formule qui a permis au premier Avengers de la maison concurrente de triompher. D’ailleurs, c’est Joss Wheddon, scénariste et réalisateur de ce même Avengers, qui fut en charge à la fois du script mais aussi du reshoot de certaines scènes de ce Justice League.
Beaucoup apprécient à juste titre ou non l’esthétique propre au cinéma de Zack Snyder et furent déçus par le précédent opus l’Aube de la justice. Ces mêmes admirateurs craignaient la touche de Wheddon plus cynique et plus clinquante (mais pourtant bien plus efficace sur Avengers) sur le travail de Snyder. Résultat, apport ou non, le travail des deux artistes s’effondre dès les premières minutes, tant la mise en scène que la photo se noient dans une succession incessante et surtout insupportable de poses aguicheuses des protagonistes. La narration n’est même plus trépidante ou décousue, elle n’est que succession de saynètes mal agencées saupoudrées d’un humour racoleur et dispensant le long-métrage d’une quelconque fluidité voire d’une quelconque cohérence. Les nombreuses ellipses suscitent l’incompréhension pour justifier sans nul doute d’une sortie longue en vidéo…une habitude chez la firme après Batman vs Superman et Suicide Squad.
Mais ce qui interpelle le plus au sein de ce naufrage sans fin ni finalité c’est bel et bien la prétention affichée par Snyder de se vouloir auteur (ce qu’il n’est plus depuis son premier film, l’honnête remake de Romero). Il s’essaie à des dialogues à la psychologie de comptoir, noble tentative certes mais très mal amené. De surcroît, le film se révèle le plus à la peine dans ses velléités épiques : jamais au grand jamais le principe de film de super héros ne transparait à l’écran, tant les personnages peinent à le crever et à rendre un semblant d’émotion. Justice League s’impose alors comme le méta film qu’il ne faut pas faire et surtout rassemble les pires défauts qu’on attribue au genre ces dernières années. Tout ce qui détruit le genre depuis près de trois ans, Justice League le concentre dans un condensé crasse qui envoie le travail de Nolan en enfer, et saborde la franchise pour de bon.
Alors qu’en début d’année Logan redonnait la bonne direction à un genre en mal d’inspiration et Thor Ragnarok assumait complétement son côté gentiment outrancier, Justice League n’existe quant à lui que pour justifier les détracteurs dudit genre. Incapable de corriger ses défauts récurrents, Snyder accouche d’un produit voyeur et bâclé sans âme ni envergure. Voulant surpasser la concurrence, il est désormais loin derrière et la franchise à genoux quand bien même elle fut debout depuis le départ de Christopher Nolan.
Film américain de Zack Snyder avec Henry Cavill, Ben Affleck, Gal Gadot. Durée 2h. Sortie le 15 novembre 2017.