Un historien conservateur
Chroniqueur talentueux au Figaro magazine, Jean Sévillia est aussi connu pour avoir écrit des biographies, comme celle de la dernière impératrice d’Autriche, Zita (Perrin, 2003) et surtout pour des essais contre le conformisme intellectuel qui règne en France, particulièrement au sein des historiens. Ainsi Le terrorisme intellectuel (Perrin, 2000), Historiquement correct (Perrin, 2003), Quand les catholiques étaient hors la loi (Perrin, 2005) et Moralement correct (Perrin, 2007) se sont-ils succédés en ce début de siècle. Sa participation au Livre noir de la Révolution n’en fut que plus logique. En 2015, il a fait paraître chez Michel Lafon cet essai, La France catholique, juste après le mouvement de la manif pour tous avec une idée en tête : le catholicisme n’est pas mort en France.
Catholiques, encore et toujours
L’intérêt de l’ouvrage de Sévillia est de proposer un portrait de cette France catholique, oubliée des médias jusqu’en 2013. L’auteur reconnaît la baisse drastique du nombre de baptêmes, de mariages et d’ordinations de prêtres qu’il expose courageusement. Pour autant, il note l’existence d’un catholicisme vivant, plus urbain que rural, militant et ayant intégré les usages du monde actuel. Le catho de 2018 manie très bien internet et les réseaux sociaux. Sévillia insiste aussi beaucoup sur l’imprégnation catholique de la France : pourquoi pas ? Nier l’évidence ne sert à rien. Il démontre aussi l’importance des communautés charismatiques, s’inspirant d’exemples protestants, amenant à la foi chrétienne des adultes et aussi d’anciens musulmans, séduits par le discours du Christ (qu’ils connaissent car Jésus est très présent dans le Coran).
Contre les cathos de gauche, malgré Vatican II
Le vrai problème de l’ouvrage est le suivant. Que Jean Sévillia soit de droite le regarde et c’est son droit. Cependant, dans son livre, on entend une petite musique critique envers Vatican II, coupable d’avoir fait fuir les fidèles et brisé la spiritualité en voulant à tout prix s’ouvrir à la modernité pour faire pièce aux communistes (sans compter le tiers-mondisme de certains prêtres). Or, par-delà la polémique qui fait du bien, c’est proposer une reconstitution de l’histoire. La crise des vocations est un phénomène ancien et la déchristianisation remonte en beaucoup de départements aux XVIIIe et XIXe siècles. Le matérialisme de la société de consommation est bien plus responsable de la crise spirituelle actuelle que la doctrine sociale de l’Eglise ou ce qu’on a appelé (avant les cathos de gauche) le catholicisme social auquel l’auteur de ces lignes est très attaché.
A lire, pour comprendre et réfléchir.
Sylvain Bonnet
Jean Sévillia, La France catholique, Perrin « Tempus », octobre 2017, 150 pages, 7 €