Black Panther, Civil War
Peu après les événements de Captain America : Civil War, T’Challa alias Black Panther revient sur ses terres natales, le Wakanda, pour succéder à son défunt père sur le trône. Pris dans une lutte d’influence issue de vieilles rancœurs, il va devoir affronter maints périls pour éviter une catastrophe à l’échelle mondiale.
Cette année le Marvel Cinematic Universe fêtera ses dix ans, avec en point d’orgue le démesuré Avengers Infinity War en avril prochain. Depuis son lancement, Disney et Marvel Studios n’ont point hésité à puiser leurs sources aussi bien dans les comics book originaux que dans les différents genres cinématographiques populaires. Et quand bien même le procédé s’avère putassier, nul ne peut contester l’indéniable réussite marketing de l’opération avec, il faut reconnaître à la clé quelques franches réussites critiques.
Le studio revient aujourd’hui avec l’adaptation des aventures de Black Panther, premier super-héros africain de l’histoire des comics book. La création du personnage n’a rien d’anodine puisqu’il apparaît au beau milieu des années soixante en pleine période d’émancipation et de réclamation des droits de la communauté afro-américaine. Une manière forte à l’époque pour l’éditeur de marquer son identité politique et sociale. Une façon également de transposer les problèmes généraux de l’Afrique aux Etats-Unis via un personnage issu d’une mystérieuse nation, que les scénaristes doteront par la suite d’une prodigieuse technologie ; pied de nez aux amalgames et autres clichés…
Pour porter les aventures de ce héros symbolique sur grand écran, le choix de Ryan Coogler sans être forcément étonnant (le studio confie beaucoup de projets à de jeunes cinéastes au final) pouvait cependant laisser craindre le pire, son Creed s’apparentant à un produit vaguement fonctionnel.
Comme pour faire taire les critiques d’entrée, il s’essaie à une exposition léchée à l’instar de James Gunn sur le premier Guardians of the Galaxy entre simplicité et émotion. Evoquant au passage hors champ les affrontements de Los Angeles en 1992, il pose d’emblée les enjeux du long-métrage. Au lieu d’apposer les problèmes de l’Afrique aux Etats-Unis, il opte pour le transfert inverse, celui des problèmes des afro-américains au Wakanda. Si l’effort se veut noble et ambitieux, le résultat ne sera pas à la hauteur des attentes des uns et des velléités de son auteur.
En effet, en dépit d’une reconstitution visuelle quasi parfaite du royaume africain, Coogler ne parvient jamais à se mettre au niveau de ses désirs et de son sujet. S’il dispose d’un casting de choix (Forest Withaker, Angela Basset et Martin Freeman, excusez du peu), il n’arrive jamais à le mettre réellement en valeur, l’abaissant très souvent à des dialogues cabotins et à des interprétations dépourvues de la moindre nuance. Contrairement aux frères Russo par exemple, il ne parvient jamais à extirper un véritable enthousiasme au spectateur, n’usant jamais du souffle épique propre pourtant à la franchise. Il accouche plutôt de tous les stéréotypes du film à grand spectacle bas de gamme sans âme ni originalité. Pourtant, il s’essaie à tous les recours pour vitaliser son œuvre, vainement…Mais le comble survient quand à l’heure des comptes, on constate que la ligne directrice en filigrane ne traite que d’une énième guerre des gangs…et ramène aux pires poncifs du genre.
Pavé de bonnes intentions, le chemin du Black Panther l’est surement, tout comme son réalisateur Ryan Coogler. Cependant, incapable de sortir de ses limites, le cinéaste ne parvient même pas à rendre ne serait-ce qu’un produit efficace. Contrairement au récent Thor : Ragnarok du même studio, Black Panther a pris un pari bien trop risqué et oscille tout du long dans sa recherche d’identité.
Film américain de Ryan Coogler avec Chadwick Boseman, Miachael B.Jordan, Forest Withaker, Martin Freeman. Durée 2h14. Sortie le 14 février 2018