Ancien élève de Jean Tulard et aujourd’hui professeur à Sorbonne Université, Jacques-Olivier Boudon a publié de nombreux ouvrages. Citons Le roi Jérôme (Fayard, 2008) et Napoléon et la campagne de France (Armand Colin, 2014). Il consacre ici une étude à une des campagnes les plus célèbres de Bonaparte, l’Egypte, qui est aussi un de ses échecs les plus fameux.
Une expédition coloniale décidée par la France révolutionnaire
Conquérir l’Egypte correspondait à plusieurs buts : continuer la guerre contre l’Angleterre en essayant d’atteindre l’Inde, regénérer l’Egypte, fonder enfin une nouvelle colonie pour une France qui avait perdu le Canada et ses possessions indiennes au traité de 1763. Bonaparte y trouvait son compte et avait aussi l’occasion de trouver en Orient le moyen d’augmenter sa gloire de nouvel Alexandre. L’expédition comptait 40 000 hommes, en majorité soldats et marins, mais comptait aussi des scientifiques curieux de connaître ce pays mystérieux. La conquête fut rapide, le choc culturel profond : la greffe de la France révolutionnaire avait du mal à prendre sur cette terre musulmane. Le choc de la conquête et de ses massacres y était pour beaucoup.
Une guerre fondatrice
Les français réussirent à se maintenir après le départ du futur empereur plus de deux ans. Ils apprirent à domestiquer le terrain, à traiter avec des chefs locaux pour asseoir leur domination. Si les anglais et les turcs mirent fin à leur présence, nombre de soldats tirèrent de leur expérience égyptienne des méthodes (dont le quadrillage par des colonnes et aussi l’usage de la « terreur » auprès des populations locales) qui leur servirent en Calabre, en Espagne et surtout en Algérie. Un épisode fondamental donc et qui permit aussi à l’Europe de se passionner pour l’antiquité égyptienne. Champollion n’aurait pas décrypté la pierre de Rosette sans cette expédition.
Excellente synthèse écrite dans une langue claire et concise. Elle ravira les amateurs.
Sylvain Bonnet
Jacques-Olivier Boudon, La campagne d’Egypte, Belin, octobre 2018, 320 pages, 24 €