Un Predator chez les Indiens
Critique de Prey, nouveau volet de la saga Predator, signé Dan Trachtenberg
1719. Amérique du Nord. Naru, jeune Comanche constamment rabaissée par les membres de sa tribu à commencer par son propre frère, ne se démarque pourtant pas par ses qualités de chasseuse hors pair.
Désirant avant tout protéger les siens, Naru va devoir se confronter non seulement à un prédateur venu d’ailleurs, mais surtout à elle-même…
Volet de la dernière chance, Prey suscitait toutes les réticences en raison de la présence de Disney studios au niveau de la production. Cependant, le studio tant décrié, choisit de placer derrière la caméra un certain Dan Trachtenberg, auteur notamment du malin 10 Cloverfield Lane. Une décision qui va s’avérer judicieuse au final !
Lors d’un défi avec son frère aîné, Naru vise en prenant son temps, attendant le moment opportun pour exécuter sa cible. Plus prompt, plus audacieux, son adversaire élimine avant elle un aigle en plein vol. Quelques secondes d’hésitation pour l’héroïne, plus encline à la prudence, à la réflexion. Une manière efficace pour le cinéaste de caractériser sa protagoniste, quoiqu’un poil redondante après une première scène similaire au début du long-métrage.

En plongeant l’action en plein cœur des grandes plaines américaines, en ce début du dix-huitième siècle, Dan Trachtenberg tente plus qu’un pari en insufflant un esprit western à la licence. Ce risque, il est
vrai, calculé s’ajoute à l’engagement féministe annoncé d’emblée qui souffrira d’ailleurs d’un traitement illustratif trop prononcé. Cependant, cet écueil certes rédhibitoire ne doit en aucun cas éluder les qualités inhérentes du long-métrage de Trachtenberg.
Récit initiatique
En apposant un récit initiatique à celui de l’affrontement entre deux chasseurs, le metteur en scène densifie sa narration, étoffant plus que de raison la personnalité de son héroïne. Difficile de ne pas
évoquer Danse avec les loups ou le Dernier des Mohicans lorsque Trachtenberg s’épanche sur la tribu de Naru et sur son apprentissage façonné par le fracas des armes, la mise à mort du gibier et les traditions claniques.
Au fur et à mesure que la tension s’intensifie et que la menace se rapproche, Trachtenberg économise les paroles et les gestes au bénéficie de quelques flambées de violence bien senties avec comme point
d’orgue l’embuscade au cœur de la brume matinale. L’esprit primal qui animait le long-métrage original de Mc Tiernan refait alors surface en dépit d’effets numériques un poil voyants, à l’instant où le Predator, en haut de la chaîne alimentaire, élimine serpents venimeux, ours, Amérindiens ou trappeurs. Puis
dès que cessent les cris d’horreur , on se rend compte qu’aucun son ne peut retranscrire la douleur ressentie à la perte d’un être cher. Peut-être la plus belle scène du film.

En refusant d’adopter une attitude fan service qui dessert la plupart des franchises actuellement, Dan Trachtenberg préfère revenir aux sources mêmes d’une mise en scène épurée, limpide, diablement efficace qui fit la force du premier Predator. Sans égaler toutefois l’œuvre de John McTiernan, Prey en devient l’héritier légitime et incarne à la perfection le produit bien élaboré, mené tambour battant.
Film américain de Dan Trachtenberg avec Amber Midthunder,
Dan DeLiegro, Harlan Blayne Kytwayhat. Durée 1 h 39. Sortie le
5 août 2022 sur Disney +
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