L’histoire du cinéma muet italien qui connu ses heures de gloire entre 1896 et 1930, avant l’avènement du parlant.
Voyage à travers le cinéma muet italien
À travers des images d’archives pour la plupart méconnues, Italia, Le Feu, La Cendre retrace l’histoire du cinéma muet italien de ses débuts en 1896 à sa chute en 1930 avec l’arrivée du parlant.
Ces quinze dernières années ont vu fleurir plusieurs fictions consacrées au passé glorieux du cinéma, en sus des hommages verbeux et pompeux de Quentin Tarantino ou du courant néoclassique mené par l’œuvre de Clint Eastwood. On se souvient par exemple de The Artist, d’Hugo Cabret ou de Babylon qui ont tous tenté (maladroitement) d’évoquer la période du muet, les progrès technologiques sur grand écran voire la fin de cet âge d’or (dans le cas du long-métrage de Damien Chazelle). Mais quels que soient leurs défauts, ces différents films ont eu au moins le mérite de remémorer au public l’existence d’un temps oublié, hormis par quelques spécialistes.
Et c’est dans une optique identique, celle de faire découvrir une partie obscure de l’Histoire du septième art que Céline Gailleurd et Olivier Bohler nous présentent aujourd’hui le documentaire Italia, Le Feu, La Cendre. Car il faut avouer que même pour les amateurs éclairés, le cinéma muet se résume essentiellement aux noms de Charlie Chaplin, Buster Keaton, Fritz Lang, Friedrich Murnau, D.W Griffith, Serguei Eisenstein, ou George Méliès. Mais il est peu probable en revanche que nombre de ces amateurs connaissent Giovanni Pastronne et Lyda Borelli, deux figures illustres du cinéma muet italien ou aient pu contempler les premières moutures des aventures de Maciste.
Pour la postérité
Voilà pourquoi les deux cinéastes séduisent dans leur entreprise pédagogique avec Italia, Le Feu, La Cendre. Et il faut d’emblée saluer leur travail de recherche minutieux qui a permis de rassembler moult images grâce aux archives des cinémathèques et des collections privées. Ce sont d’ailleurs sans doute les dernières encore disponibles de cette époque du cinéma italien puisque la plupart des longs métrages ont été détruits lors de la Seconde Guerre mondiale. Un gâchis culturel… d’autant plus que ce documentaire démontre toute l’inventivité déployée par les artistes transalpins, un savoir-faire qui a priori avait peu à envier aux expressionnistes allemands ou au burlesque outre-Atlantique.
Si Italia, Le Feu, La Cendre souffre par moments d’un certain académisme en raison de l’exposition chronologique des différents longs-métrages, il envoûte néanmoins le spectateur via la voix off de Fanny Ardant, qui rapporte élégamment les propos de ceux qui ont vécu l’essor du cinéma muet en Italie. Les extraits défilent sous nos yeux et dévoilent un tourbillon créatif qui s’appuie aussi bien sur la culture classique (ah éternel Shakespeare), les problèmes sociétaux (les grèves brisées par l’interprète de Maciste) que sur les grands visages de l’Histoire italienne, Garibaldi en tête.
On dénote l’ampleur gargantuesque de certains projets et l’aisance de chaque réalisateur à valoriser la multitude, de la foule antique ou contemporaine au choc des troupes en passant par les manifestations. Surtout, Italia, Le Feu, La Cendre n’impressionne jamais que lorsqu’il s’attarde sur les prouesses de mise en scène résultant de l’imagination des auteurs, de la qualité du montage et de la parfaite maîtrise des trucages. Céline Gailleurd et Olivier Bohler ont choisi chaque morceau avec beaucoup d’à propos pour illustrer le tout. Ainsi que dire quand on découvre avec un certain effroi les risques encourus par les équipes au moment de tourner avec peu de sécurité ou de confort à des endroits surréalistes (Maciste chez les chasseurs alpins) bien qu’il n’y avait ni hélicoptère ni prise de vue aérienne…
Sans révolutionner la forme du documentaire, Italia, Le Feu, La Cendre fascine au moins par son sujet et parvient à nous transporter aisément dans un univers trop méconnu. Et s’il n’atteint pas la plénitude du Voyage à travers le cinéma américain de Martin Scorsese ou de son pendant français signé Bertrand Tavernier, le film remplit son rôle pédagogique avec soin. Un bon point essentiel.
Film de Céline Gailleurd et Olivier Bohler avec la voix de Fanny Ardant. Durée 1h34. Sortie le 15 mars 2023
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